Mobilité urbaine à Tunis : vers une coopération avec l’agglomération de Toulouse
de répondre aux enjeux de coordination, de planification et de financement du secteur des transports urbains tunisiens, l’Agence Française de Développement soutient dans le cadre d’un FEXTE (Fonds d’expertise technique et d’échanges) la mise en place d’un programme de coopération avec le Ministère du Transport tunisien. CODATU intervient comme animateur de cette coopération lancée le 3 février 2016 et accompagne ainsi le Ministère du Transport dans l’amélioration de a qualité, l’efficacité et l’attractivité des transports urbains du Grand Tunis.
La mobilité urbaine à Tunis : un secteur aux acteurs multiples
Tunis, capitale de la Tunisie, représente une agglomération urbaine d’environ 2 200 000 habitants. Elle est constituée de quatre Gouvernorats – équivalents de départements administratifs : Tunis au centre, Ariana au nord, Manouba à l’Estet Ben Arous au Sud.
Les acteurs du transport public à Tunis sont nombreux. On compte tout d’abord le Ministère du Transport, responsable de la stratégie, et les opérateurs publics et privés pour l’exploitation. L’opérateur public principal est la Société des Transports de Tunis (STT ou Transtu) et exploite un réseau de métro léger – type de tramway – un réseau de bus et une ligne de train de banlieue historique entre Tunis et La Marsa – le TGM. L’exploitation de quelques lignes de bus supplémentaires est assurée par quatre compagnies privées : TCV (Transport en Commun de Voyageurs), TUT (Transport Urbain de Tunisie), TUS (Transport urbain et Suburbain) et STC (Société de Transport Collectif). La SNCFT (Société Nationale des Chemins de Fer Tunisiens) est présente dans le Grand Tunis à travers l’exploitation d’une ligne de banlieue sud ainsi que d’un réseau ferré suburbain en construction : le RFR (Réseau Ferré Rapide). Enfin, la société du RFR est responsable de la maîtrise d’oeuvre de ce nouveau réseau, et travaille donc en collaboration avec la SNCFT sur ce projet.
A ceux-ci s’ajoutent une quantité d’acteurs indirectement impliqués dans les décisions : les syndicats présents à tous les niveaux, notamment auprès des chauffeurs de taxis, le ministère de l’Equipement pour la gestion de la voirie, le Ministère des Finance pour les attributions de budget, les agences telles que l’Agence d’Urbanisme du Grand Tunis ou l’Agence Nationale de la Maitrise de l‘Energie, les gouvernorats et municipalités, etc… La multiplicité de ces acteurs rend l’organisation généralement difficile pour les projets de transport et de développement urbain.
La mise en place d’une autorité organisatrice des transports urbains à Tunis nécessaire pour guérir le secteur
En réponse à cette multitude d’acteurs, une loi sur le transport mise en application en 2004 préconise la création d’Autorités Régionales Organisatrice de Transport. Ces autorités permettraient ainsi une bonne planification et mise en œuvre des projets de transport urbain. Cependant, à cause d’un manque de précisions quant à la mise en œuvre de ces autorités, aucune n’a actuellement vu le jour. Sans autorité organisatrice, les projets et initiatives du secteur continuent de souffrir d’un manque de coordination et de centralisation des informations.
Une conséquence de ce manque de coordination est l’impact négatif sur les mécanismes de financement du transport public. Ceux-ci n’ont pas été mis à niveau et les opérateurs de service public sont aujourd’hui en situation de déficit colossal, avec par exemple 700 millions de dinars cumulés pour la Transtu. Les opérateurs fonctionnent avec des tarifs dépassés qu’ils ne peuvent actualiser, et pratiquent des réductions de tarifs et des gratuités à certaines catégories de voyageurs sous demande de l’état. Celui-ci doit verser des subventions en conséquence mais elles pas à temps et le manque de liquidités empêchent les opérateurs de mener à bien leurs opérations de maintenance et de développement. Le Ministère à régulièrement recourt à des opérations d’assainissement afin de réduire le déficit des entreprises sous tutelles.
Toulouse intéressée pour développer des activités de coopération internationale avec Tunis sur le sujet
Cet atelier a été l’occasion de faire intervenir le SMTC-Tisséo, l’autorité organisatrice des transports de l’Agglomération de Toulouse, en France, afin de travailler avec les autorités tunisiennes sur le projet d’autorité organisatrice dans le Grand Tunis. Cette intervention du SMTC-Tisséo résulte d’une volonté du SMTC-Tisséo de s’investir à l’international à travers des actions de coopération.
Toulouse est la 4e ville de France avec environ 458 000 habitants pour la municipalité, et environ 1,3 millions d’habitants sur l’agglomération urbaine. Le réseau de transports urbain est organisé sous l’autorité du SMTC-Tisséo, et principalement exploité sous forme de concession de service public par Tisséo, un établissement public à caractère industriel et commercial. Ce réseau est composé de deux lignes de métro VAL (Véhicule Automatique Léger), deux lignes de tramway et plusieurs lignes de bus dont deux à haut niveau de service (Linéo).
Intéressé par un partenariat avec Tunis, le SMTC-Tisséo a donc été impliqué, à travers l’atelier organisé en juillet, dans le processus de mise en place d’une autorité organisatrice à Tunis. L’autorité a de cette manière proposé un accompagnement des décideurs tunisois sur la question de la structuration institutionnelle, l’intégration du réseau de transport public et la planification des déplacements urbains.
Une délégation tunisienne invitée à Toulouse pour encourager la mise en place d’une coopération
Les modalités de coopération restant à définir, le SMTC-Tisséo à organisé en partenariat avec CODATU une visite technique à Toulouse afin de présenter le fonctionnement de son réseau, et poursuivre la réflexion sur l’établissement d’une coopération décentralisée. Cette visite s’inscrivait ainsi dans la continuité de l’atelier organisé en juillet sur les autorités organisatrices. Elle avait pour objectif principal de saisir l’impact des choix institutionnels sur le développement et l’exploitation d’un réseau multimodal, ainsi que de se rendre compte des relations entre le SMTC-Tisséo, l’exploitant Tisséo.
De nombreuses thématiques ont été abordées pendant cette visite qui a eu lieu du 3 au 7 octobre 2016 : organisation du secteur, intégration tarifaire, systèmes billettiques, intermodalité, gestion de l’exploitation, sûreté… La délégation tunisienne a notamment été accueillie par M. Jean-Michel Lattes, président du SMTC-Tisséo, et M. Jean-Michel Evin, son directeur général qui ont ainsi exposé les enjeux de mobilité urbaine dans l’agglomération toulousaine et présenté le contenu du « Projet Mobilité 2025-2030 », équivalant à une révision du Plan de Déplacements Urbains. Des visites au centre billettique des Argoulets, dans le pôle d’échanges multimodal des Arènes et au dépôt de bus de Colomiers ont permis d’illustrer les propos présenté par les représentant du SMTC-Tisséo et de Tisséo.
A la lumière de cette visite, une réflexion a été démarrée auprès des autorités tunisiennes pour l’organisation d’actions de coopération qui renforceraient les relations avec l’agglomération toulousaine. Plusieurs thématiques peuvent être envisagées pour cibler ces actions : appui à l’évolution institutionnelle du secteur, accompagnement dans la définition de la politique tarifaire, organisation de l’exploitation du réseau, etc… Cette réflexion permettra de faire ressortir les actions de coopération pertinentes à mettre en place qui permettront d’entretenir les échanges sur la continuité entre Toulouse et Tunis.