Quelle place pour les transports urbains dans les négociations internationales ?
Jusqu’à
présent, le transport urbain n’apparaît dans les négociations climatiques qu’à travers les mécanismes financiers. En effet, les initiatives locales d’actions de réduction des émissions de GES dans les transports urbains des pays en développement peuvent bénéficier, sous certaines conditions, de dispositifs de soutien notamment financiers. Il s’agit des mécanismes de flexibilité du Protocole de Kyoto, comme le Mécanisme pour un Développement Propre (MDP) ou de l’accès à des fonds tels que le Fonds Vert ou le Fonds pour l’Environnement Mondial ou encore de mécanismes incitatifs et de coopération (Transfert de Technologie).
Depuis 2007, des démarches volontaires des pays en développement telles que les « Nationally Appropriate Mitigation Actions » (NAMA’s) sont également possibles dans le cadre onusien. Intégrant les autres avantages environnementaux, sociaux et économiques des politiques de transport, ces mécanismes apparaissent beaucoup plus adaptés au secteur des transports.
Le Mécanisme pour un développement propre (MDP): un outil inadapté au transport
Le MDP peut permettre à un pays industrialisé (par le biais de son gouvernement ou d’entreprises publiques ou privées) d’investir dans un projet de réduction des émissions de GES dans un Pays en développement. En échange des réductions constatées, un volume équivalent d’Unités de Réductions d’Émissions Certifiées (UREC) lui est délivré. Cet investisseur pourra vendre ses Unités sur le marché ou les déduire de ses obligations internationales de réduction. Ce mécanisme doit favoriser le transfert de technologie vers les Pays en développement.
Le secteur des transports est éligible au MDP, mais il est un des parents pauvres. Contrairement à des projets industriels dont les effets sont à plus court terme, les projets de transport urbain impliquent de nombreux acteurs, nécessitent souvent des montages institutionnels complexes et demandent des investissements importants qui s’inscrivent dans la durée.
On ne compte que 37 projets enregistrés et en cours de validation soit 0,4 % du total des projets MDP tous statuts d’enregistrement confondus et les ressources financières mobilisées par ce biais sont bien maigres pour les projets concernés.
Figure 1. Répartition des MDP par secteur
Source: Recommentations from WCTRS to COP19 (2013)
Les Nationally Appropriate Mitigation Actions (NAMAS)
C’est en 2007, lors de la COP 13 à Bali que le « Plan d’Action de Bali » a donné naissance aux NAMAs. Ce sont des actions de réductions d’émissions volontaires des pays en développement qui doivent permettre de contribuer à l’effort de réduction des émissions mondiales. 114 pays se sont engagés à proposer des mesures volontaires d’atténuation du dérèglement climatique en s’appuyant sur ce dispositif. Un NAMA doit impérativement :
– S’inscrire dans une politique nationale de développement durable
– Contribuer à la réduction des émissions de CO2
– Présenter des co-bénéfices dans d’autres secteurs
– Faire référence à une situation connue afin de pouvoir montrer les réductions d’émission attendues en utilisant une méthodologie MRV (Mesurer, Rapporter, Vérifier) pour quantifier les impacts des mesures prises
Contrairement aux MDP, près de 64 % des NAMAs soumis à la CCNUCC concernent le secteur des transports. Ils peuvent constituer un levier intéressant pour limiter la croissance des émissions de GES issues des transports de passagers et de marchandises en générant par ailleurs d’importantes externalités positives telles que l’amélioration de la qualité de l’air ou encore la réduction de la congestion. Concernant l’appui financier,on peut différencier les NAMAs en trois types :
– NAMA unilatéraux : financés et exécutés entièrement par le pays hôte
– NAMA financés (au moins en partie) par les pays développés et/ou des financements internationaux et/ou ayant du soutien technologique ou de renforcement de capacités par les pays développés.
– NAMA crédités : la totalité ou partie des réductions d’émissions bénéficient de la délivrance correspondante de crédits carbone.
Selon une étude réalisée par ECOFYS en 2014 sur les NAMAs déposés auprès du secrétariat de la CNUCCC, une grande majorité fait appel à des financements des pays de l’Annexe 1. Une part non négligeable de ces NAMAs font également appel au soutien technologique et de renforcement des capacités de la part des pays développés.
Figure 2. Répartition des NAMAs par secteur
Source: NAMA-database
Les Outils de financement de projets
Le Fonds pour l’Environnement Mondial (FEM)
Le FEM fait partie des Fonds pour le climat qui permettent de financer des activités en faveur de l’atténuation ou l’adaptation au changement climatique. Il permet aux pays et villes en développement de mobiliser des fonds supplémentaires pour financer leurs projets majeurs. Dans le secteur des transports, les cofinancements issus du FEM peuvent être notamment utilisés dans le but d’améliorer les transports publics ou de promouvoir les transports non-motorisés.
Le Fonds pour les Technologies Propres (Clean Technologie Fund :CTF)
Le CTF a été créé en 2008, et forme avec le Fonds stratégique climat (SCF) ce que l’on nomme les Fonds d’Investissement Climat (FICs). Le CTF est destiné à soutenir les pays à revenus intermédiaires dans la lutte contre le changement climatique à travers le financement de projets à grande échelle. L’efficacité énergétique des véhicules, le report modal et les transports collectifs de masse sont des axes majeurs d’intervention du CTF dans le secteur du transport urbain. Plus de 14 % des fonds du CTF sont actuellement affectés au transport urbain.
Le Fonds Français pour l’Environnement Mondial (FFEM)
Le Fonds Français pour l’Environnement Mondial (FFEM) a pour mission de favoriser la protection de l’environnement mondial dans les pays en développement, depuis sa création par le gouvernement français en 1994. Dans ses orientations stratégiques, la planification urbaine et la question des transports constituent une des priorités. La planification urbaine comme outil de lutte contre le changement climatique est clairement identifié comme un des axes stratégiques servant à identifier les projets à financer. Ceux-ci doivent d’ailleurs s’inscrire dans le cadre des conventions internationales sur le changement climatique.
Le Fonds Vert pour le Climat
Le fonds vert pour le climat (Green Climate Fund : GCF) a été créé lors de la conférence pour le climat de Cancun en 2010. Il s’agit d’un mécanisme financier de l’Organisation des Nations unies, rattaché à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC). Ce fonds, officiellement été lancé lors de la conférence de Durban en 2011 et encore en cours de structuration, pourrait devenir à terme le principal fonds international destiné à la lutte contre le changement climatique.
D’autres guichets de financement
Des guichets complémentaires existent, et financent dans une moindre mesure les projets de transport urbain : Clean Energy Financing Partnership Facility (Banque Asiatique de Développement), Fast Start Finance (Japon), International Climate Initiative (Allemagne), etc.