[Coopération technique Egypte] – Atelier sur les mécanismes de financement en dehors des recettes tarifaires
Cet atelier s’est tenu dans le cadre de l’accord d’assistance technique signé le 12 novembre 2017 entre le Ministère de l’investissement et de la Coopération Internationale d’Égypte (MIIC), l’Agence Française de Développement (AFD), CODATU et le CEREMA. Cette coopération technique est financée par l’AFD dans le cadre d’une convention FEXTE et bénéficiera principalement au Ministère des Transports d’Égypte, ainsi qu’aux acteurs concernés par la mobilité urbaine au Caire et en Alexandrie.
Revenus non tarifaires
En 2016, lors du Forum de Mobilité Urbaine « Mécanismes financiers au-delà des recettes tarifaires pour l’opération du métro et des trains urbains » organisé au Caire, une trentaine de mesures ont été identifiées pour répondre aux enjeux financiers que rencontrent les opérateurs de transport public. Ces mesures ont été regroupées en cinq principales catégories s’appuyant sur : la valorisation de l’infrastructure et des équipements du métro, les coûts d’exploitation, les droits, taxes et redevances, ainsi que des mesures liées à la billettique et la tarification et diverses autres mesures. (Consulter le Compte-rendu du FMU2016).
Parmi l’ensemble de ces mesures, trois mesures d’entre elles ont été présentées et discutées lors de l’atelier au Caire : la captation de la valeur foncière ; la vente de naming rights ou droit de dénomination des stations de métro ; ainsi que les mesures de régulation pour réduire les coûts d’exploitation.
Des participants aux profils hétérogènes (financiers, techniques et administratifs) ont suivi cet atelier de trois jours, représentant des institutions aussi différentes que le ministère des Transports (MoT), le Gouvernorat du Caire, l’Autorité de Planification des Transports (TPA), l’autorité de régulation du transport terrestre (LTRA), la National Authority for Tunnels (NAT), l’Egyptian Company for Metro (ECM), le M.O.T for I&P, et l’autorité publique de transport d’Alexandrie (APTA). Les participants ont été appuyés par les consultants et experts suivants :
- Dr. Zoi Christoforou, Experte senior en mobilité et consultante CODATU.
- M. Pierre Nouaille, Chargé de projets en socio-économie des transports, CEREMA
- Dr. Solène Baffi, Cheffe de projet CODATU
- M. Nicolas Pagès, Directeur sécurité, opérations et technique, TRANSDEV
- M. François Bruyant, Senior VP Business Development, TRANSDEV
Mécanismes liés à la capture de la valeur foncière
En préambule à la présentation de certains mécanismes par le CEREMA, il a été précisé que tous les outils sont basés sur l’hypothèse que le foncier et les biens immobiliers gagnent de la valeur par la mise en place d’une infrastructure de transport. Celle-ci est sensée améliorer/améliorera l’accessibilité du territoire dans lequel elle sera située, renforçant de ce fait son attractivité et ce qui aura pour conséquence l’augmentation de la valeur du bien immobilier localisé à proximité. Une partie de cette augmentation est alors prélevée par des autorités publiques afin d’être mobilisée pour financer le projet d’infrastructure de transport public.
Il a été mis en avant que la relation entre la valeur du bien immobilier et le projet de transport est difficile à prévoir et n’est pas systématiquement positive, mais qu’elle est conditionnée par plusieurs facteurs. Dans la pratique, différents mécanismes sont opérationnels et ont été discutés : des mécanismes fiscaux tels que le Tax Increment Financing (TIF) aux Etats Unis, le Business Rate Suppement (BRS) au Royaume-Uni ou encore la taxe Grenelle II en France et les raisons de son échec. Des dispositifs basés sur la propriété du terrain ont été présentés à travers l’exemple du projet Orestad au Danemark, ou les « ZAC » en France. Enfin, la vente des droits à construire ont été illustrés par l’exemple brésilien des Certificates of Additional Construction Potencial (CEPAC).
Une loi égyptienne qui se rapproche de l’esprit de ces mécanismes fiscaux existe : la « taxe d’amélioration » de loi n° 222 de 1955. Elle a été également présentée pour démontrer la possibilité de s’appuyer sur cette loi afin de développer un éventuel outil plus efficace dans le contexte du financement du transport public en Egypte. Enfin, le M.O.T for I&P en tant que branche de l’ENR et responsable de la gestion de son foncier, a présenté un exemple de valorisation sur un terrain situé à Alexandrie.
La vente de naming rights pour les stations de métro
Cet outil, majoritairement utilisé dans le cas d’équipements sportifs et culturels consiste à vendre ou à louer le nom de l’équipement (généralement public) pour une durée prédéterminée à une entreprise privée. Cela permet d’une part à l’entreprise de promouvoir son image, et d’autre part cela permet au propriétaire de l’équipement de générer du revenu. Parmi les exemples cités, on retrouve l’Emirates Stadium à Londres ou le Palais Omnisport de Paris-Bercy, Accor Hotels. Cette pratique s’est répondue aussi sur des réseaux de métro tel que celui de Dubai, New Delhi, Londres, Chicago ou Wuhan.
Dans le cadre de l’atelier, c’est l’exemple des mesures mises en place à Madrid par l’opérateur de métro qui a servi de base pour les échanges, en particulier les objectifs de la mise en place de cet outil, les différents « lots » qui ont été vendus par l’autorité du métro au niveau de la signalétique, les supports de communication mobilisés, ainsi que les sites internet ou les applications mobiles. La présentation et les échanges ont porté sur les facteurs importants à prendre en compte tels que la durée du contrat, le choix des stations, des compagnies, des lots à vendre ou les coûts de mise en œuvre.
La régulation du trafic
Les mesures de régulation ont pour objectif la rationalisation de la circulation des personnes et des véhicules en vue de garantir principalement la sécurité, la fiabilité et le confort des déplacements. Ces mesures peuvent être de type spatial ou temporel. On utilise ainsi les feux de circulation, les passages prioritaires, la séparation des circulations…etc. Appliqués au transport collectif, des outils opérationnels tels que l’arrêt alternatif à certaines stations ou les terminus partiels permettent d’éviter les phénomènes de bunching ou d’optimiser la circulation des véhicules.
À travers les présentations CODATU et Transdev, et une visite au centre du contrôle des lignes de métro 1 et 2 de l’ECM, il a été mis en évidence que ces mesures et la modification des modes opératoires ont des bénéfices économiques sur les opérateurs et les passagers. En effet, une mauvaise régulation impacte le coût d’exploitation, soit par une baisse de fréquentation et ainsi une baisse des revenus, soit par des pénalités pour l’opérateur ou l’augmentation des coûts de maintenance et de consommation d’énergie. Enfin, l’automatisation du métro a été évoquée pour présenter les bénéfices générés par ce type de système.
Il a été enfin précisé qu’une compréhension fine du système en place est nécessaire pour à la fois introduire les mesures de régulation adéquates, et pour estimer les éventuels bénéfices économiques qui peuvent être induits.
Les trois mesures ont été remontées au niveau du ministère des Transports avec quelques recommandations dont :
- La participation à travers un comité du ministère au projet de réforme de la loi 222 de 1955, ainsi que l’étude des possibilités pour des projets d’investissement et d’acquisition du foncier par les autorités de transport pour les futures lignes et stations.
- L’étude par l’ECM et l’ENR des possibilités d’application du naming rights dans le contexte égyptien.
- L’étude par l’ECM de possibilité de régulation au niveau du métro du Caire.